Soit je suis morte soit je deviens oiseau

— But not always an after

— Even if it was after

— After the disaster

— Pourquoi commencer par une citation de Maggie Nelson?
— Parce que dans ce livre, et dans sa vie, elle réinvente le deux, l’être-à-deux, de manière rigoureusement non-binaire. Le couple qu’elle forme avec Harry Dodge est plus et moins que deux, mais ni un ni trois, tout sauf un nombre entier, un deux fait de fractions irrationnelles.
— Un deux queer en quelque sorte.
— C’est ça. Le projet part de cette hypothèse: c’est à deux et à partir du deux que le problème du nous doit être posé, mais pas un deux binaire, mâle/​femelle ou femme/​machine ou voix/​écriture, un deux trouble et instable, où l’identité de l’un.e comme de l’autre serait incertaine. Un duo pour lequel il faudrait inventer des manières nouvelles d’être à deux, parce qu’aucun des deux pôles n’est fixe…

Toutes ces filles couronnées de langues
Celle qui a tourné dix mille fois sept fois sa langue dans sa bouche

Bien entendu tes héros se couvraient de gloire quand les miens étaient trahis par leurs compagnons ou dévorés par un cyclope. Il me fallait une idée pour rompre la ronde de tes succès. Elle me vint alors que nous survolions un chantier abandonné. Le pilote venait d’amorcer la phase d’atterrissage. Je choisirais le Dieu de Philon contre la multitude de tes Olympiens. Je serais le singulier, tu serais le pluriel. Ce serait notre dernier acte.

Rosy-Blue a trouvé un truc très scénique

Tu n’es plus dans la chambre, tu as quitté l’appartement. Premier plan, un tableau, une femme nous regarde. Elle est brune ses yeux sont bleus. On entend des conversations, des témoignages, la femme du tableau a été assassinée. Elle apparaît par fragments, au fil des conversations, des descriptions. Plan sur l’horloge. C’est l’histoire de Laura. Laura Hunt a été assassinée un dimanche soir dans son appartement de New York, nous sommes en 1944, Laura n’a pas de visage, deux coups de chevrotine, la peau éparpillée, plus de traits. Il pleut, on entend la musique de David Raksin. I shall never forget the week-end Laura died.